La première campagne de Belgique – 57 -
Durant son consulat, en -59, César s’était fait accorder, à l’issue de celui-ci et pour cinq ans, le proconsulat de la Gaule cisalpine (l’Italie au nord du Pô), et de l’Illyrie, avec trois légions (les 7, 8 ,9) La mort de Metellus Celer, gouverneur militaire de la Province, lui donne l’occasion de faire ajouter à ses missions et ses moyens , le commandement militaire de la Gaule transalpine et une quatrième légion (très probablement la 6).
L’octroi de ces troupes lui permet d’envisager à partir des territoires de son proconsulat, des opérations soit vers l’Est, dans les Balkans, soit vers l’ouest, en Gaule chevelue; ce qui lui apporterait la gloire dont il a besoin pour se hisser à la première place de Rome, et une possibilité de se renflouer pécuniairement.
Au large de l’Illyricum, la Pannonie, la Macédoine et la Grèce sont des pays pauvres, turbulents certes, mais d’accès malaisés, et connus du Sénat. Une expédition militaire dans les Balkans serait difficile à justifier, et de toutes façons peu rentable.
La Gaule, par contre, est un pays riche, divisé, dont les bandes armées ont, au cours des siècles passés, ravagé plusieurs fois les pays latins et grecs, ce qui a laissé des traces dans la mémoire du peuple romain, qui ne sera pas mécontent de voir les Gaulois payer leurs insolences passées.
Les premiers - et presque les seuls - renseignements que nous possédions sur la Gaule indépendante nous viennent de César lui-même . Il avait sur elle des notions assez partielles en y arrivant; elles lui venaient surtout de la lecture de Poseidonios (-133– 49), dont les sources sur les Gaulois dataient quand même d’environ un siècle
Dès le début de son mandat, au commencement de -58, les Helvètes, en prétendant traverser la Province pour aller s’établir en Saintonge, lui offrent le prétexte, qu’il cherchait, à une intervention musclée. Dans cette affaire et dans la lutte qui suivit contre le Suève Arioviste, le rôle des Héduens en général, et de Diviciacos en particulier, est suffisamment flou pour donner lieu à des soupçons sérieux de collusion avec César, dans le but pour les uns, de tenter d’établir l’hégémonie héduenne sur l’ensemble des cités de la Gaule chevelue, et pour le Romain, de justifier ses ambitions.
Ce que les Héduens ne soupçonnaient pas, c’est que César allait profiter de leur complicité pour conquérir la Gaule entière.
Les civitas belges, peut-être parce qu’elles étaient encore proches de leurs traditions germaniques d’autonomie sourcilleuse et de xénophobie viscérale, devinèrent les premières les conséquences qu’allaient avoir l’arrivée du Proconsul, et se fédérèrent pour l’expulser.
Pendant des années, les autres cités de la Gaule chevelue ne parviendront pas à taire leurs rivalités et se feront laminer une à une par le Romain. Il faudra attendre -52 et Vercingétorix, pour faire abandonner – en apparence du moins - aux Héduens la collaboration romaine, et regrouper en une coalition nationale la presque totalité des Gaulois (excepté les Trévires, immobilisés par une menace germaine sur leur flanc nord, les Rèmes et les Lingons).
Après avoir renvoyé les Helvètes chez eux, et fait repasser le Rhin aux survivants des hordes d’Arioviste, César fait hiberner ses troupes en Séquanie.
Averti par diverses sources et un courrier de Labienus - à qui il avait laissé le commandement de l’armée - que des otages s’échangent entre les civitas de Belgique et que celles-ci mobilisent, il lève deux légions en Italie du Nord, et rejoint ses troupes dès le printemps 57.
Dès qu’il peut réquisitionner du blé, il se met en route, et en quinze jours arrive aux frontières de la Champagne. Les Rèmes, surpris par une telle rapidité, et peut-être désireux de se libérer de la tutelle de leurs alliés Suessions, lui font allégeance ..
César décide d’attendre les armées belges en pays Rème, qui peut lui assurer du ravitaillement et couvre ses liaisons avec la Province.
Il s'installe en position centrale par rapport aux trois directions dangereuses - sans doute vers Jonchery - et place des légions sur chacun des axes d'arrivée possibles des Belges :
- Laon et le camp de Sissonne par Beaurieux
- Noyon par Braine et Laffaux
- La rive gauche de l'Aisne vers Compiègne et Villers-Cotterêts.
Cette première campagne de Belgique, en -57, va compter trois batailles :
1 Avec la complicité et le soutien des Rèmes, le proconsul brise la coalition belge sur la colline qui portera plus tard le fort de Condé. C’est la bataille de l’Aisne, qui dans les semaines qui suivent, voit la reddition successive des Suessions, des Bellovaques, et des Ambiens.
2 Il se heurte alors aux Nerviens de Boduognatos qui a regroupé autour de lui les Atrébates et les Viromandues. C’est la bataille dite de la Sambre par nos anciens, de la Sabis ou de la Selle par nous, qui amènera la reddition de ces trois civitas.
3 Il se tourne enfin vers les Atuatuques qui n’étaient pas arrivés à temps pour participer à la bataille précédente, ni sans doute à la bataille de l’Aisne, s’empare de leur forteresse de Namur et vend les survivants comme esclaves.
Aucune de ces expéditions ne sera définitive, et durant toute la Guerre des Gaules, on verra César retourner périodiquement en Belgique pour ramener à la raison ces populations réfractaires à la « Romana Way of life ».
Ce sont ces trois batailles que nous allons maintenant vous exposer.